Sante

Gabon : la santé mentale, grande oubliée des priorités nationales

Avec plus de deux millions d’habitants, le Gabon ne dispose que d’un seul centre spécialisé pour la prise en charge des troubles mentaux : le Centre national de santé mentale (CNSM) de Melen, à Libreville. Un établissement vétuste, confronté à un manque criant de moyens, qui peine à répondre aux besoins croissants de la population en matière de santé mentale.

Dans un contexte social marqué par une hausse du stress, de l’anxiété, de la dépression et de comportements à risque, les structures d’accueil et de suivi psychologique restent largement insuffisantes. Le CNSM, seul à être officiellement dédié à la santé mentale sur le territoire national, concentre à lui seul l’ensemble des cas lourds, souvent dans des conditions inadaptées. Le centre souffre d’un sous-effectif chronique, d’un plateau technique limité et d’un accès difficile aux traitements modernes.

À l’échelle des hôpitaux régionaux, la situation est encore plus préoccupante. La plupart des structures de santé ne disposent pas de personnel formé spécifiquement à la prise en charge psychologique ou psychiatrique. Les patients souffrant de troubles mentaux sont parfois orientés vers des services non spécialisés, avec tous les risques que cela comporte. Cette absence de maillage territorial laisse une large partie de la population sans solution de proximité.

Face à cette réalité, de nombreux acteurs de la société civile et professionnels de santé plaident depuis plusieurs années pour une réforme du système de santé mentale. Ils pointent notamment l’absence d’un plan national structuré, l’insuffisance de psychologues et de psychiatres, et la persistance de préjugés sociaux qui découragent de nombreuses personnes à consulter. « Nous faisons face à une double problématique : un manque de structures et une stigmatisation encore très forte des troubles mentaux. Beaucoup de familles attendent le dernier moment pour chercher de l’aide, souvent quand les situations sont déjà critiques », explique un agent du CNSM.

Alors que le gouvernement s’engage dans des réformes multisectorielles depuis la Transition politique entamée en 2023, plusieurs observateurs estiment qu’il est temps d’intégrer pleinement la santé mentale aux grands chantiers nationaux. Au même titre que l’éducation, l’eau, l’électricité ou l’emploi, la santé mentale devrait faire l’objet d’un programme structurant, adossé à un financement conséquent et à une volonté politique affirmée.

Dans une société où les traumatismes, les inégalités et le mal-être psychologique s’expriment de plus en plus, notamment chez les jeunes, l’inaction pourrait avoir des conséquences profondes sur la cohésion sociale. Des solutions existent, qu’il s’agisse de renforcer la formation, d’ouvrir des unités spécialisées dans les Centres Hospitaliers Universitaires, de mettre en place des campagnes de sensibilisation ou encore de créer un réseau national de santé mentale. Mais tout cela nécessite une impulsion claire au sommet de l’État.

À ce titre, la santé mentale mérite de figurer parmi les priorités du président de la République. Elle n’est pas un luxe, mais une condition fondamentale du bien-être collectif.

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