Bras de fer sur l’avenir économique du Gabon : le gouvernement conteste le pessimisme des experts

Alors que la Banque africaine de développement et l’agence Fitch Ratings dressent un portrait économique sombre pour le Gabon, marqué par une croissance atone et des fragilités structurelles, les nouvelles autorités de Libreville défendent leurs réformes et estiment que les « signaux positifs » sont injustement ignorés. Un choc des récits qui pose la question de la crédibilité et du timing des réformes.
Le verdict sans appel des institutions internationales
Dans un rapport récemment publié, la Banque africaine de développement (BAD) anticipe un « ralentissement économique persistant » pour le Gabon, avec une croissance qui plafonnerait à 2,3 % en 2025 puis 2,1 % en 2026.
La cause, la dépendance écrasante à un secteur pétrolier en déclin, qui représentait encore 41,5 % des recettes budgétaires en 2024. Pour l’institution panafricaine, les réformes annoncées par le pouvoir issu de la transition n’auront qu’un « effet limité à court terme ».

Ce diagnostic sévère est corroboré, et même amplifié, par l’agence de notation Fitch Ratings. En juin 2025, elle a maintenu la note souveraine du Gabon à « CCC », un niveau qui signale un « risque de crédit très élevé ».
Fitch enfonce le clou en listant les vulnérabilités, allant du déficits récurrents à lourde dette publique (75 % du PIB) en passant par des arriérés de paiement estimé à 2,8 % du PIB en 2024.
La contre-offensive de Libreville : « Les signaux positifs sont là »

Face à ce tableau quasi noir, le gouvernement gabonais a choisi de ne pas faire le dos rond. Dans une communication officielle, le ministère de l’Économie a affirmé « prendre acte » de l’évaluation de Fitch, mais a immédiatement contesté ses conclusions. Selon Libreville, la notation ne reflète pas « suffisamment les signaux positifs récemment observés ».
Les autorités mettent en avant deux types d’avancées. D’une part, des progrès politiques, comme la tenue d’élections jugées transparentes en avril 2025, gage de stabilité.

D’autre part, un volontarisme économique affiché, avec l’objectif de « rétablir les équilibres budgétaires dès 2026 » et des efforts concrets pour améliorer la transparence, restructurer la dette domestique et refinancer les échéances à venir.
Le message du gouvernement est un appel à regarder au-delà des chiffres bruts du passé pour prendre en compte une dynamique de changement en cours. C’est une demande de confiance dans une trajectoire, plutôt qu’un jugement sur une situation héritée.
Entre prudence des chiffres et optimisme politique

Au cœur de ce décalage se trouve la question classique de savoir si il faut juger une économie sur ses performances passées ou sur ses promesses d’avenir ? Les institutions comme la BAD et Fitch s’appuient sur des données tangibles et des tendances structurelles lourdes.
Leur prudence est légitime du simple fait que la diversification de l’économie prendra du temps et que l’inertie du « tout-pétrole » est immense.

Le gouvernement, lui, est dans une posture politique. Il doit rassurer sa population, ses partenaires et les investisseurs en affirmant qu’un nouveau cap a été fixé. Il vend une vision et demande à être jugé sur ses actions futures.
Le véritable test pour les autorités gabonaises sera de transformer cette volonté politique en résultats économiques mesurables, et ce, assez rapidement pour inverser les tendances observées par les experts.