Certificats médicaux gratuits : un soulagement pour les personnes handicapées, un casse-tête pour les hôpitaux ?
Le ministère de la Santé vient d’annoncer la délivrance gratuite des certificats médicaux aux personnes handicapées classées Gabonais économiquement faibles (GEF). Une décision perçue comme une victoire sociale, mais dont l’application concrète risque de mettre à l’épreuve des hôpitaux déjà fragilisés.
Le Gabon vient d’adopter une nouvelle mesure destinée à améliorer l’accès des personnes handicapées à leurs droits sociaux. Dans une note circulaire datée du 4 septembre 2025, le ministre de la Santé, Pr Adrien Mougougou, a instruit les directeurs généraux des Centres hospitaliers régionaux à délivrer gratuitement les certificats médicaux exigés dans le cadre des démarches administratives, notamment pour l’obtention de l’allocation annuelle dite secours permanent.
« Je vous instruis de procéder dorénavant à la délivrance gracieuse des certificats médicaux requis pour la constitution des dossiers administratifs de ces concitoyens en situation de vulnérabilité », écrit le ministre dans le document, rappelant que cette décision s’inscrit dans le cadre de la loi n°19/95 du 19 février 1996 sur la protection et la promotion des droits des personnes handicapées.
La mesure vise exclusivement les personnes handicapées immatriculées à la CNAMGS et reconnues comme GEF.
Une bouffée d’oxygène pour les bénéficiaires
Pour les premiers concernés, cette gratuité constitue une avancée concrète. Jusqu’ici, le coût récurrent des certificats médicaux représentait une charge supplémentaire dans des foyers déjà fragilisés. « C’est une bonne nouvelle pour nous. Nous avions parfois l’impression que l’administration ne voyait pas nos difficultés. Cette mesure enlève au moins un obstacle », témoigne un responsable d’association de personnes handicapées à Libreville.
Une décision politiquement porteuse
En termes d’image, le gouvernement marque un point. L’annonce donne l’impression d’un État attentif aux plus vulnérables, soucieux de traduire ses textes en actions concrètes. Dans un contexte où la confiance citoyenne est érodée, une telle décision nourrit un discours de légitimité sociale et peut être perçue comme un signal d’ouverture politique.
Mais une équation budgétaire délicate
Derrière l’élan inclusif, plusieurs zones d’ombre demeurent. Les hôpitaux devront supporter le coût administratif et logistique de la mesure sans qu’un mécanisme de compensation financière n’ait été annoncé. Pour des structures déjà confrontées à des manques chroniques de moyens, cette obligation pourrait se transformer en fardeau supplémentaire.
Autre limite : la gratuité ne s’applique qu’aux personnes handicapées enregistrées comme GEF. Une catégorie administrative qui, en pratique, laisse de côté des citoyens vulnérables mais mal recensés ou mal classés dans le système. Le risque est donc de créer de nouvelles fractures au sein même de la communauté des personnes handicapées.
Entre avancée sociale et risque d’effet d’annonce
En définitive, la gratuité des certificats médicaux pour les personnes handicapées est une mesure socialement juste et symboliquement forte. Mais son efficacité dépendra de la capacité de l’État à accompagner financièrement les hôpitaux et à élargir progressivement le dispositif à l’ensemble des personnes réellement vulnérables.
Faute de quoi, cette annonce, aussi louable soit-elle, pourrait bien rejoindre la longue liste des réformes affichées comme inclusives mais freinées par la réalité budgétaire et administrative.