Politique

Crise au sein de Réagir : déménagement furtif du siège, tensions et incompréhensions

C’est un déménagement qui ne passe pas inaperçu, malgré sa discrétion. Le siège du parti politique Réagir (Réappropriation du Gabon, de son Indépendance, pour sa Reconstruction), situé au quartier Bas de Gué-Gué à Libreville, a été vidé de fond en comble dans des conditions pour le moins troubles. À l’origine de cette opération : François Ndong Obiang, président du parti et ministre en charge de la Réforme des institutions. Un départ précipité qui suscite la colère de plusieurs membres du mouvement, alors que l’affaire est toujours pendante devant la justice.

Selon des témoignages concordants recueillis sur place, c’est dans l’après-midi du 15 juillet qu’un camion lourdement chargé a quitté les lieux, emportant avec lui l’ensemble du mobilier, des documents internes et même l’enseigne du siège. Depuis, le bâtiment est totalement désert. Aucun signe de vie, aucune explication officielle, pas même une clé laissée aux membres qui y étaient pourtant légalement reconnus comme occupants.

Un conflit de légitimité interne mine le parti depuis plusieurs mois. D’un côté, le camp de Félix Bongo, vice-président de Réagir et plaignant dans le litige ; de l’autre, celui de Ndong Obiang, qui a maintenu son contrôle sur le siège malgré une procédure judiciaire toujours en cours. Le procès, prévu pour le 12 août prochain, devra trancher la question de la légitimité d’occupation des locaux.

Mais ce retrait surprise que certains qualifient de « fuite en avant » semble être un nouveau rebondissement dans une crise politique qui ne dit pas son nom. Alors que les trois proches collaborateurs de Ndong Obiang, Bruno Ondo Mintsa, Fabrice Ekomo Ossazeh et Denard Ovono alias « Wayne » ont été récemment inculpés, le déménagement soudain interroge : s’agit-il d’une stratégie d’évitement ou d’une tentative de sabotage institutionnel ?

Félix Bongo, joint par téléphone, affirme n’avoir été informé de rien. « Je ne dispose d’aucune clé, et je découvre comme tout le monde que le siège est vide », déclare-t-il, visiblement abasourdi. Une situation absurde pour celui qui, selon les statuts du parti, reste le principal occupant légal du site.

En toile de fond, un climat de désillusion gagne plusieurs militants. D’autant plus que, selon certaines sources internes, la grande majorité du matériel du siège aurait été financée collectivement contributions en nature, en numéraire, jusqu’aux plus petits objets du quotidien. Une dynamique solidaire que Ndong Obiang, qualifié de « président fondateur » mais présenté comme n’ayant jamais cotisé personnellement, aurait décidé d’effacer en emportant tout.

À quelques semaines des élections législatives et locales, cette querelle fratricide expose au grand jour les fragilités de certains partis politiques gabonais, souvent construits autour d’une figure centrale, au détriment des structures et des processus démocratiques internes. En se retirant sans explication, Ndong Obiang semble tourner le dos à la logique de responsabilité politique, laissant derrière lui un champ de ruines symbolique : un parti divisé, un siège vidé, et une procédure judiciaire encore ouverte.

Le silence prolongé de son camp ne fait qu’alimenter les interrogations. En attendant le verdict du 12 août, le parti Réagir paraît figé dans une impasse, victime de ses dissensions internes autant que de la personnalisation extrême de son leadership.

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