Retour à la case départ ? Raymond Ndong Sima dénonce les irrégularités du double scrutin du 27 septembre

Aux lendemains des élections législatives et locales du samedi 27 septembre, l’ancien Premier ministre de la Transition, Raymond Ndong Sima, a réagi avec virulence. Dans une publication sur sa page Facebook ce dimanche, il a dressé un constat amer du scrutin, estimant que le pays est revenu « à la case départ », malgré les espoirs suscités depuis le 30 août 2023.
Pour Raymond Ndong Sima, cette date avait marqué « un jour de libération », avec l’ouverture d’une transition qu’il pensait « destinée à corriger les errements passés et à remettre le pays sur un chemin qu’il n’aurait jamais dû quitter ». Dialogue national, référendum, présidentielle… autant d’étapes qui semblaient, selon lui, traduire une volonté de rupture. Mais à l’épreuve du premier grand scrutin de masse de l’ère post-transition, « le logiciel n’a pas changé ».
L’ancien Premier ministre dénonce une série d’irrégularités qui, selon lui, compromettent la sincérité du vote. « Quand du nord au sud, d’est en ouest, au même moment, des protestations montent bruyamment en raison de la composition des bureaux de vote essentiellement entre les mains du parti du Président de la République », écrit-il. Il pointe également « la gestion spéciale des procurations » et le fait que « des partis engagés dans ces élections n’obtiennent pas un seul scrutateur dans la quasi-totalité des bureaux de vote ».
Raymond Ndong Sima va plus loin, évoquant le phénomène des électeurs transportés en masse pour peser artificiellement sur les résultats : « Quand, partout dans le pays, des bus entiers d’électeurs-mercenaires, ces fameux transhumants, se déversent sur des sièges où ils n’ont aucune attache familiale, aucun intérêt économique, pour y forcer le résultat des urnes », écrit-il, avant de dénoncer la présence persistante de « personnes décédées, régulièrement déclarées auprès des services du ministère de l’Intérieur, dont les cartes d’électeurs sont confiées à des bureaux qui échappent à tout contrôle ».
Face à ce constat, il se dit contraint d’admettre que la transition n’a pas rempli ses promesses : « On est bien obligé de constater qu’on n’a pas changé de logiciel. On est dans la continuité du système qu’on était supposé avoir écarté pour le bien de tous ». Et d’ajouter : « Une victoire construite sur du mensonge est une victoire qui ne présage rien de bon. Elle préfigure même des lendemains inquiétants ».
La sortie de Raymond Ndong Sima intervient dans un contexte politique délicat : ce double scrutin représentait le dernier jalon de la transition avant la mise en place d’institutions élues. Son jugement sévère traduit une désillusion profonde et une méfiance persistante face à la capacité du système à se réformer réellement. Objectivement, les griefs qu’il avance ne sont pas inédits : contestation de la composition des bureaux, accusations de fraude, critiques des listes électorales, autant de motifs déjà entendus lors des précédentes échéances au Gabon. La singularité réside cette fois dans le fait qu’ils surviennent après une transition qui se voulait exemplaire.
Son intervention soulève deux enjeux majeurs. Le premier est celui de la crédibilité de la nouvelle majorité : si les accusations d’irrégularités sont avérées, elles fragilisent la légitimité du processus électoral et de ceux qui en sortiront vainqueurs. Le second est celui de la confiance citoyenne : la répétition des mêmes griefs, dans un contexte post-transition, risque d’accentuer le sentiment de désillusion des électeurs et de raviver la fracture entre institutions et population.
En définitive, la déclaration de Raymond Ndong Sima pose une question essentielle : la transition a-t-elle réellement permis une refondation démocratique, ou n’a-t-elle fait que reconduire sous un nouveau visage les pratiques qui ont longtemps plombé la vie politique gabonaise ?