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Souveraineté numérique : Libreville au cœur du bras de fer technologique mondial

Alors que le Gabon accélère sa transformation numérique, les coulisses de ses négociations révèlent une stratégie diplomatique aussi fine que complexe. Loin d’être une simple affaire de câbles et de data centers, la quête de souveraineté numérique du pays est en train de devenir un cas d’école de navigation entre les blocs d’influence américains, chinois et, désormais, du Golfe. Libreville joue sur un échiquier où chaque partenaire potentiel représente une pièce dans le grand jeu technologique mondial.

L’offensive de charme américaine

Les discussions engagées avec le géant des réseaux Cisco et l’accord déjà signé avec la société de cybersécurité Cybastion pour la construction du data center national ne sont pas anodins.

Washington, engagé dans une compétition féroce avec Pékin pour définir les normes technologiques du futur, voit dans des pays comme le Gabon des partenaires stratégiques.

Avec la proposition des solutions « sécurisées » et « interconnectées », les États-Unis cherchent à ancrer leurs technologies et leurs standards sur le continent, contrant ainsi l’influence de leur rival.

Pour le Gabon, s’associer à des leaders américains est un gage de performance et de fiabilité, mais aussi un signal envoyé à ses partenaires occidentaux.

L’ombre du dragon chinois et l’héritage européen

Pourtant, cette offensive américaine se déploie sur un terrain où la Chine a déjà solidement planté son drapeau. Les discussions antérieures avec Huawei rappelle que le géant chinois est un acteur incontournable des infrastructures de télécommunications en Afrique, souvent avec des offres financières très compétitives dans le cadre de sa « Route de la Soie Numérique ».

Certes non retenu pour le projet de data center à ce stade, son ombre plane et symbolyse une alternative puissante que le Gabon peut toujours activer.

À cela s’ajoute la présence historique d’acteurs comme Moov Africa Gabon Telecom, filiale du groupe marocain Maroc Telecom, lui-même détenu en partie par Etisalat, des Émirats Arabes Unis. Une illustration de la complexité d’un écosystème déjà multipolaire.

La troisième voie du Golfe

C’est dans ce contexte que l’entrée en scène d’un nouvel acteur prend tout son sens. Les pourparlers avec Moro, société de cloud basée à Dubaï, ouvrent une troisième voie stratégique.

Les pays du Golfe, et en particulier les Émirats Arabes Unis, déploient un soft power technologique et financier de plus en plus affirmé en Afrique.

Perçus comme des partenaires d’affaires pragmatiques et potentiellement plus neutres sur le plan politique que Washington ou Pékin, ils offrent une alternative séduisante.

Pour Libreville, s’associer à un acteur de Dubaï permet de diversifier ses alliances, d’attirer des capitaux frais et d’éviter une dépendance excessive à l’un des deux grands blocs.

La souveraineté par la diversification

La stratégie gabonaise apparaît alors limpide. Il ne s’agit pas de choisir un camp, mais de tirer le meilleur de chacun pour construire sa propre autonomie.

En ne mettant pas tous ses œufs dans le même panier géopolitique, le gouvernement maximise sa marge de manœuvre.

Il peut comparer les technologies, négocier les prix et, surtout, garder le contrôle de son architecture numérique, pilier de sa souveraineté.

Chaque discussion, qu’elle aboutisse ou non, est un levier de négociation avec les autres.

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